Former à l’enseignement des ARTS à l’école primaire : le prisme scientifique au service d’un remaniement didactique
Ana-Vanêssa Lucena, Marcelle Moor, François Joliat
HEP-BEJUNE, Suisse
La professionnalisation des formations des futur·e·s enseignant·e·s du primaire demande une refonte profonde des cours de didactique, envisagés sous un prisme scientifique. Contrairement à d’autres disciplines où la recherche didactique est solidement établie, la didactique des disciplines artistiques (DDA) demeure marginale, confinée à ce que certains qualifient d’« existence dans l’ombre » (Grossenbacher et Oggenfuss, 2013, p. 80). Elle peine à se profiler dans les débats scientifiques des Hautes écoles pédagogiques sur l’identité des didactiques disciplinaires et leur influence en formation et sur les pratiques.
Dans le contexte de la formation tertiaire à l’enseignement des didactiques des Arts pour les degrés primaires, cette recherche examine les discours de quatre forma.teurs.trices en DDA d’une HEP de Suisse romande afin d’éclairer leur épistémologie personnelle et professionnelle. L’objectif est d’identifier les formes de pensées didactiques sur lesquelles ces experts fondent leur action et orientent leur enseignement (Amade-Escot, 2019 ; Sensevy et Mercier, 2007).
Pour interroger ces enjeux, nous avons adopté une méthodologie basée sur un dispositif d’autoconfrontation simple (Clot, 2006). Ces forma.teurs.trices en DDA sont invités à revenir sur leurs pratiques en visionnant une leçon qu’ils ont conduite avec leurs étudiant.e.s. Les discours qui en résultent sont analysés au moyen d’une grille conceptuelle structurée autour de quatre catégories linguistiques rattachées aux valeurs et usages narratifs du présent (présent d’énonciation, historique/prévisionnel, d’habitude, de vérité) (Kaempfer et Micheli, 2005 ; Serbat, 1980).
Afin de décrire systématiquement leurs activités et de remonter aux conceptions sous-jacentes à l’action, cette étude mobilise des approches issues de l’ergonomie de l’activité, de la didactique professionnelle et de l’analyse des pratiques (Paillé et Muchielli, 2008). Les entretiens transcrits sont examinés selon une méthode inductive, en mettant l’accent sur les valeurs et les usages narratifs du présent dans leurs discours (Kaempfer et Micheli, 2005 ; Serbat, 1980).
Les valeurs et usages du présent dans les discours sont appréhendés comme des catégories herméneutiques (Paillé et Mucchielli, 2008), permettant d’explorer Lebenswelt [la façon de faire] des formateurs (Laoureux, 2009). Ces éléments reflètent la sédimentation des expériences mobilisées par les enseignants pour concevoir et conduire leurs leçons (Cavasino, 2021 ; Terrien, Auteur 3 et Chatelain, 2023).
1. Le présent d’énonciation : utilisé lorsque le formateur décrit ou évalue directement ses actions didactiques, ce présent révèle parfois des émotions associées à l’action.
2. Le présent historique ou prévisionnel : employé pour narrer des faits passés ou envisager des situations futures, il confère une impression d’immédiateté, permettant de « donner à voir les faits » comme simultanés de l’énonciation (Kaempfer et Micheli, 2005, p. 12).
3. Le présent d’habitude ou de vérité générale : ce présent dépasse le cadre temporel de la narration pour exprimer des principes atemporels, souvent issus d’une expérience accumulée ou de savoirs didactiques construits au fil du temps (Kaempfer et Micheli, 2005, p. 11). Ces invariants peuvent être reformulés comme des principes structurants.
Les premières analyses montrent que ces formateurs en DDA explicitent rarement leurs intentions en se limitant à une description des gestes spécifiques (présent d’énonciation). Leurs discours s’élargissent pour inclure des compréhensions complexes du contenu enseigné et des stratégies pédagogiques, souvent articulées à des cadres temporels passés ou futurs.
Les formateurs mettent en lumière des principes directeurs de leur pratique, ancrés dans des valeurs et références temporelles multiples. Ils relient leurs actions à des expériences marquantes du passé ou à des aspirations pour l’avenir, tout en exposant des règles générales structurantes guidant leur pratique et celle de leurs étudiants.
À ce stade, notre recherche approfondit les réflexions sur le positionnement des formateurs en action, dans le but de renforcer leur impact sur les pratiques didactiques. Par ailleurs, elle contribue également à mettre en évidence une identité spécifique aux DDA au sein des HEP.
Corps et formation : analyse clinique de l’engagement corprorel des stagiaires en éducation physique
Magali Descoeudres, François Ottet, Sandra Jourdan
HEP Vaud, Suisse
Contexte théorique, problématique et question de recherche
Cette recherche s'inscrit dans la continuité d'une étude exploratoire (Ottet, 2016) portant sur les déplacements des enseignants stagiaires en éducation physique au cours de leurs leçons. Elle vise à mettre en lumière la dimension corporelle de leur activité, un aspect fréquemment négligé dans les programmes de formation. Le corps semble en effet être l’oublié de la formation (Ottet & Méard, 2018). Cependant, l’utilisation du corps en classe s’acquiert progressivement et peut être perfectionnée (Pujade-Renaud, 2005).
Les compétences corporelles relèvent de gestes professionnels façonnés par des expériences situées (Ria, Sève, Saury, Theureau & Durand, 2010) et un cadre culturel donné. Savoir habiter son corps et le mettre en scène dans les déplacements constitue une compétence professionnelle essentielle (Tellier, 2023). Au cœur des situations d’enseignement, le corps sert de support à des démonstrations, des parades, des aides physiques et des régulations à travers de nombreux déplacements. Véritable caisse de résonance des émotions (Descoeudres & Ottet, 2020), le corps n’est jamais neutre, notamment pour l’enseignant en éducation physique (Durand, Hauw & Poizat, 2015). Cette étude vise à comprendre et à transformer les pratiques professionnelles des enseignants stagiaires en éducation physique en analysant leur engagement corporel à travers une approche clinique de l’activité.
Design et méthode
Les travaux pionniers dans ce champ ont postulé que la formation des enseignants devait intégrer une dimension clinique (Pujade-Renaud, 1977), les confrontant à leur propre image en contexte pédagogique afin d’analyser l’impact du corps dans les cours. En mobilisant le cadre théorique de la clinique de l’activité (Clot, 1999), cette étude adopte une approche permettant d’explorer l’activité réelle des enseignants, au-delà de ce qu’ils croient ou disent faire. L'accent est mis sur la dimension subjective de leur activité à travers le déplacement durant les leçons.
Quatre étudiants en formation à l’enseignement de l’éducation physique ont participé à l’étude. Deux leçons d’éducation physique ont été filmées sous deux angles : un plan d’ensemble pour observer l’agencement de la situation et les déplacements de l’enseignant et un plan moyen pour focaliser sur son activité corporelle. Après chaque leçon, un entretien d’auto-confrontation simple a été mené à partir d’extraits sélectionnés par l’équipe de recherche selon un relevé des déplacements. L’analyse des descriptions et ressentis recueillis visait à analyser l’activité des stagiaires sous le prisme des déplacements et de la posture de leur corps.
Résultats
Les résultats mettent en évidence que l’attention portée au corps dans toutes ses dimensions – émotionnelle, sensorielle et sociale – favorise le développement de l’activité des stagiaires, leur permettant de construire une expertise professionnelle ancrée dans leur vécu corporel. De plus, ils illustrent une évolution progressive des pratiques corporelles des stagiaires, se traduisant par un passage de comportements désorganisés et semi-conscients à une gestion plus intentionnelle et efficace des mouvements et des postures. Ces transformations entraînent une redéfinition des significations attribuées aux gestes professionnels, influencées par des expériences corporelles marquantes, souvent mises en lumière grâce à l’usage de la vidéo lors des entretiens d’autoconfrontation.
Ce travail souligne l'importance de dispositifs de formation innovants intégrant une attention particulière à la dimension corporelle de l’activité professionnelle (Ottet et al., 2024). Les résultats de cette recherche pourraient inciter à s'interroger sur les contenus à inclure dans une formation initiale destinée au corps enseignant (Tellier, 2021). Elle vise à répondre aux besoins spécifiques des stagiaires en début de carrière afin de réduire les abandons précoces du métier et de promouvoir leur santé, leur bien-être et conscience d’eux-mêmes au travail (Emond, 2022).
Angsterleben im Sportunterricht – die Bedeutung der Lehrperson
Sonja Büchel, Felix Kruse, Christian Brühwiler
PHSG, Schweiz
Im Idealfall ist die Schule und der Unterricht ein Ort, an dem sich Schüler:innen gerne aufhalten, lernen, sich entwickeln und sich mit Mitschüler:innen treffen. Es kommt aber auch immer wieder vor, dass Schüler:innen in der Schule negative Emotionen oder Angst erleben. Ängste gehören zum Leben und zum Lernen dazu, allerdings sollten sie nicht übermässig bzw. als bedrohlich wahrgenommen werden (Stein, 2012). Angsterleben kann sich bei Schüler:innen negativ auf ihr Lernen auswirken (Pekrun et al., 2002) und unterschiedliche Ursachen haben. Leistungs- bzw. Prüfungssituationen können Angst auslösen. Es kann aber auch sein, dass Angst besteht, sich vor den Mitschüler:innen zu blamieren, z.B. wenn man Sportunterricht etwas vorzeigen muss. Weiterhin kann Angst verbunden mit der Lehrperson und ihrem Unterrichtshandeln auftreten. Befunde konnten zeigen, dass bspw. Ärger auf Seiten der Lehrperson sich über deren Unterrichtshandeln z.B. in Form der Durchsetzung disziplinarischer Ziele negativ auf das affektive Erleben der Schüler:innen auswirkt (z.B. McPherson et al., 2003). Grundsätzlich wird davon ausgegangen, dass Lehrer:innenmerkmale, v.a. auch handlungsbezogene bzw. motivational-emotionale Merkmale, das unterrichtliche Handeln beeinflussen und dieses wiederum die im Unterricht erlebten Emotionen der Schüler:innen mitbestimmen (Frenzel et al., 2021). Lehrer:innenemotionen werden dabei als wichtiger Aspekt der professionellen Handlungskompetenz betrachtet, da sie Handlungen initiieren, erhalten und evaluieren (Kunter et al., 2009). Für das Fach Sport gibt es dazu noch wenig empirische Evidenz. Der Beitrag widmet sich daher der Untersuchung des Zusammenspiels von Lehrer:innenemotionen, unterrichtlichem Handeln und Schüler:innenemotionen im Sportunterricht. Konkret wird folgende Fragestellung untersucht: Inwiefern sind Lehrer:innenemotionen bedeutsam für das Unterrichtshandeln sowie die Emotionen von Schüler:innen im Sportunterricht?
Im Rahmen der vom SNF geförderten Studie EPiC-PE «Effects of Professional Competencies of PE-Teachers on Teaching and Student Learning» wurden 735 Schüler:innen der Sekundarstufe I zu zwei Messzeitpunkten (t1 und t2) zu personalen und motivational-emotionalen Merkmalen sowie zu t2 zu Unterrichtsmerkmalen (Disziplin, motivational-emotionaler Support, kognitiv-motorischer Support, kognitiv-motorische Aktivierung) befragt. Die Lehrpersonen (N=49) bearbeiteten zu einem Messzeitpunkt (t1) eine schriftliche Befragung zu personalen, motivational-emotionalen Merkmalen (u.a. Emotionen im Sportunterricht), Überzeugungen sowie einen Test zur Erfassung des fachlichen und fachdidaktischen Wissens. Zwischen t1 und t2 fand eine sechswöchige Unterrichtseinheit in einem Inhaltsbereich (u.a. Sportspiele/Basketball) statt. Aufgrund des längsschnittlichen Designs können kausale Effekte ausgehend von Lehrer:innenemotionen auf ihr unterrichtliches Handeln und auf Schüler:innenemotionen untersucht werden. Für die Bearbeitung der Fragestellung wurden Korrelationen sowie Mehrebenen-Regressions- und -Mediationsmodelle eingesetzt.
Die Ergebnisse der Mehrebenenregressionsanalysen zeigen, dass die negativen Emotionen der Lehrperson zu t1 das Angsterleben der Schüler:innen zu t2 statistisch bedeutsam vorhersagen (β=.58***). Die positiven Emotionen der Lehrperson erweisen sich diesbezüglich als statistisch nicht signifikant (β=.11). Wird als Kontrollvariable das Professionswissen der Lehrperson hinzugezogen, bleibt der Effekt ausgehend von den negativen Emotionen der Lehrperson bestehen und das Fachwissen zeigt sich ebenfalls als statistisch bedeutsam hinsichtlich des Angsterlebens der Schüler:innen (β=-.50**). Wird das von Schüler:innenseite eingeschätzte Unterrichtshandeln miteinbezogen, zeigt sich das Disziplinerleben zu t2 auf der Within- (β=.30***) und der Between-Ebene (β=.46**) als statistisch bedeutsam für das Erleben von Angst bei Schüler:innen. Weiterhin besteht ein indirekter Effekt ausgehend von den negativen Emotionen der Lehrpersonen über das Erleben von Disziplin im Unterricht auf das Angsterleben der Schüler:innen (β=.18*). Das Mediationsmodell erklärt 67% der Varianz des Angsterlebens von Schüler:innen im Sportunterricht.
Die Ergebnisse zeigen, dass die negativen Emotionen von Lehrpersonen das Angsterleben der Schüler:innen im Sportunterricht direkt sowie indirekt, über das Unterrichtshandeln in Form von Disziplin, begünstigen. Die Kombination von negativen Emotionen, geringem Fachwissen und hohem Disziplinierungsgrad seitens der Lehrperson fördert das Erleben von Angst bei Schüler:innen. Die Befunde bieten Raum für Diskussionen hinsichtlich der Möglichkeiten zur Verminderung bzw. Regulation von negativen Emotionen und der Förderung eines adäquaten Unterrichtshandelns bei Lehrpersonen im Sportunterricht.
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